Ressources récurrentes

Redevances

Les redevances mettent à contribution les bénéficiaires des services publics locaux, mais leur usage n’est pas aussi répandu que souhaité par ses promoteurs, notamment dans les pays développés les plus décentralisés. Au motif que les bénéficiaires des services publics fournis par les collectivités locales (condition nécessaire pour l’emploi de benefit taxes) sont de plus en plus difficiles à identifier, compte tenu de la nature des prestations fournies (éducation, santé, services sociaux, habitat, emploi, développement économique…).

Impôts locaux sur le revenu des personnes

Ces impôts peuvent se concevoir sous deux formes: sous la forme de partage de recettes fiscales, ou sous la forme d’impôts partagés/empilés (surtaxe à l’impôt personnel sur le revenu en fonction de la résidence dans les pays de l’Europe du Nord, en Suisse,  dans les pays en transition de l’Europe orientale). En revanche, d’une part, l’empilement des impositions sur le revenu est à l’origine d’effets pervers : surimposition (externalités fiscales verticales),  délocalisations ou optimisations. D’autre part, la répartition spatiale des bases d’imposition sur le revenu est en général très concentrée, ce qui conduit à des dispositifs péréquatifs de grande ampleur (cf. infra).

Impôts locaux sur l’activité économique

Ces impôts consistent majoritairement en des impôts ou redevances basés sur l’exercice et/ou le chiffre d’affaires de professions déterminées à l’image des patentes, très répandues en Afrique et en Asie, ou en Amérique Latine. Les impôts locaux sur les ventes au détail persistent dans les (rares) pays où une TVA n’a pas été mise en place au niveau national (Etats Unis) ou coexistent avec une TVA fédérale (Canada). Dans ce dernier cas, le produit de la TVA nationale est souvent partagé entre les niveaux de collectivités publiques, sans possibilité pour les collectivités locales d’en ajuster le taux à leur niveau. 

Des propositions intéressantes se font jour aujourd’hui visant à mettre en place des systèmes de TVA « duaux », l’un à taux national applicable aux transactions entre professionnels, l’autre ouvrant la possibilité de modulations locales pour les ventes à des particuliers. Dans la même direction, des propositions récentes reviennent sur la possibilité de taxer la valeur ajoutée au niveau local (donc à taux différenciés) en combinant la taxation des revenus du travail et celle des revenus du capital (la valeur ajoutée étant alors fiscalisée comme la somme des rémunérations du travail et du capital, à l’exemple de la Taxe professionnelle française disparue en 2010).

Plusieurs motifs justifient des transferts financiers entre échelons de gouvernement et entre collectivités territoriales. 

  1. Les transferts financiers à but de financement servent au financement des tâches déléguées aux collectivités. Ils visent à dédommager la collectivité locale quand celle-ci est tenue de remplir une fonction pour le compte de l’échelon de niveau supérieur, comme la fourniture d’un service de base sur l’ensemble du territoire conformément aux exigences du gouvernement central. Ces transferts visent également à corriger les déséquilibres verticaux. Cela est particulièrement le cas quand les ressources propres des collectivités publiques décentralisées sont insuffisantes pour que ces dernières soient en mesure de financer les dépenses qui sont de leur compétence. 
  2. Les transferts incitatifs visent à modifier les choix budgétaires des entités qui en bénéficient pour les orienter vers des prestations souhaitées par le niveau de gouvernement qui paie. Ces transferts sont généralement associés à des prestations particulières, que le bénéficiaire devrait fournir selon des niveaux qualitatifs et quantitatifs fixés par le payeur. 
  3. Les transferts peuvent avoir pour objectif de corriger et de compenser les effets externes (de type effets de débordement) liés à la fourniture décentralisée de certaines prestations publiques. Cela est en particulier le cas quand l’aire de consommation des services publics ou le territoire bénéficiaire dépasse les frontières correspondant à l’espace institutionnel qui fournit la prestation ou quand des agents économiques non résidants peuvent bénéficier des services rendus par une collectivité sans en supporter le coût. Les services d’éducation fournis et financés par une région donnée ont par exemple des effets externes positifs sur les autres régions (en particulier si les individus sont mobiles). 
  4. Les transferts financiers ont aussi vocation à corriger les déséquilibres horizontaux entre collectivités publiques décentralisées. Les transferts ont alors un rôle de péréquation des ressources, mais aussi des besoins. Ils visent généralement à « égaliser » (rapprocher de la moyenne) les moyens à la disposition des gouvernements locaux afin que ceux-ci puissent offrir une qualité comparable (et dans une même fourchette de coûts) de services publics sur un territoire considéré. Des ressources supplémentaires sont alors transférées aux collectivités qui ont une base d’imposition potentielle  plus faible que la moyenne nationale ou des « besoins » plus élevés que la moyenne nationale (par exemple communes situées en zone de montagne).
  5. Les transferts financiers de la cinquième catégorie ont une dimension macroéconomique. Il n’est plus question ici de financement général des budgets décentralisés, ni de compensation, d’incitation ou de correction visant à une meilleure allocation des ressources. Les effets visés sont globaux. Dans le premier cas – au moins en théorie – le but est d’encourager une demande globale qui serait insuffisante en cas de mauvaise conjoncture économique. Dans le second cas, l’objectif est de piloter des projets de développement régional.
  6. Le sixième bloc concerne les politiques redistributives destinées aux personnes. Ce sont, par exemple, les aides sociales individuelles, les bourses d’étude ou les allocations versées pour enfants. Elles ne sont pas prise en compte dans le cadre de ce rapport puisqu’elles ne s’adressent pas aux collectivités locales en tant que telles.

Dotations de péréquation

Un système de transferts de péréquation bien structuré est un élément crucial du financement local, qui permet notamment de lutter contre les déséquilibres budgétaires horizontaux. Cependant les mécanismes de péréquation présentent presque toujours des failles. Les critères d’attribution peuvent par exemple ne tenir compte que des différences de capacité budgétaire ou que des charges, et non des deux. Ils sont parfois basés sur les recettes réelles plutôt que sur la capacité fiscale, ce qui constitue un frein à la mobilisation des ressources locales. Le fonds commun qui alimente les transferts peut également être instable ou mal défini, ou encore l’usage des fonds soumis à des conditions rigides qui les transforme, dans la pratique, en dotations affectées.

Quelques pays Africains seulement les ont introduites (Maroc et Afrique du Sud). En Amérique latine, certains États (exemple : Brésil et Chili) font usage de la péréquation, mais la majeure partie d’entre eux n’en ont retenu que quelques éléments qu’ils intègrent à leurs programmes de partage des recettes. Plusieurs pays d’Asie recourent aux transferts de péréquation (Australie, Indonésie, Japon) tandis que d’autres ignorent les disparités budgétaires (Chine, Inde, Philippines, Nouvelle-Zélande). Les subventions de péréquation sont utilisées en Eurasie, en Europe et en Amérique du Nord (sauf au niveau fédéral aux États-Unis) avec plus ou moins de bonheur. 

Transferts affectés/conditionnels

Ces transferts alloués par l’État ou les administrations intermédiaires servent à promouvoir les normes et les objectifs nationaux pour la prestation de services décentralisés comme, par exemple, certains aspects de l’éducation et de la santé. Ils permettent en outre de gérer les externalités inter administratives relatives, par exemple, à des questions environnementales ou d’investissement local.

Subventions à la performance et à l’innovation

Elles ont généralement été introduites dans certains pays d’Afrique et d’Asie sous l’influence des organisations internationales. Les collectivités locales restent généralement libres de décider de la meilleure façon d’utiliser les fonds. Ce type de transfert associe la flexibilité des subventions inconditionnelles à une forme atypique de conditionnalité. Elles peuvent néanmoins avoir pour effet de privilégier les communes jouissant d’un plus grand potentiel administratif et risquent de reproduire les défauts des programmes traditionnels de soutien. À ce jour, elles ont surtout servi à promouvoir le respect  forme des procédures de gestion financière et administrative, non à améliorer la fourniture des services. Il est trop tôt pour porter un jugement définitif sur l’efficacité de ce type de subvention.